Dans les archives de Catherine et Hélène, les deux filles de l”ancien député radical du Loiret, il a retrouvé de saisissantes photos noir et blanc de la jeunesse du futur ministre, de sa période d’avocat au barreau d’Orléans, de manifestations de jeunes laïcs en mairie, puis des illustrations de son action au ministère.
Dans la mémoire collective
“La place méritée au sein de notre mémoire collective, Jean Zay doit aussi l’occuper pleinement à Orléans, là où il est né, a vécu, aimé, bâti sa vie, familiale, professionnelle, politique…”, écrit Pierre Allorant. Lors de la campagne électorale de 1932, Jean Zay mit lui-même en avant cet enracinement de sa famille et de son grand père venu “des provinces perdues”, qui s’installe dans l’Orléanais. Il veut ainsi “anticiper sur la campagne violente d’adversaires qui tentent de le présenter comme un intellectuel hors sol, entendez un produit de la République honnie des avocats, des francs maçons, de juifs et des protestants, bref “l’anti-France” vu par Mauras et par le très réactionnaire Journal du Loiret.”
Son père est rédacteur en chef d’un autre journal, Le Progrès du Loiret. Allorant nous raconte ensuite les premiers écrits lycéens de Jean Zay, lorsqu’au lycée Pothier il fonde “le potache bouillant” puis le Grenier avec Marcel Abraham, René Berthelot et Roger Secrétain, futur fondateur de la République du Centre et futur maire d’Orléans. “Il y rédige des chroniques à l’ironie guêpine et il dessine aussi de sa plume “des silhouettes orléanaises”.
L’obsession des nouvelles d’Orléans
Pierre Allorant raconte encore ses “universités” aux jeunes radicaux du Loiret, ses études de droit à Paris, ses premiers pas de journaliste, son mariage au Temple, son initiation à la loge Dolet puis ses premiers pas en politique aux législatives et aux cantonales…
En prison de Riom où l’a jeté le régime de Vichy qui le fera assassiner par la milice en 1944, Jean Zay s’inquiétera du sort de sa ville, “l’obsession des nouvelles d’Orléans, cité Martyr”.
Dans cet ouvrage sur Jean Zay, sous-titré “invention, reconnaissance, postérité”, signé avec Gabriel Bergougnoux et Pascal Cordereix, PIerre Allorant décrit par le menu cet attachement viscéral à Orléans de l’ancien ministre de l’Education nationale (et des Beaux arts). Son lointain successeur, Najat Vallaud Balkacem, elle aussi mise en cause pour ses origines, et fidèle d’Orléans, a reçu l’ouvrage des mains de ses auteurs, lors des rendez-vous de l’histoire de Blois. Le rejet de l’autre: pas grand chose de nouveau sous le ciel parfois gris de nos Républiques.
Ch.B
Jean Zay, aux Presses universitaires François Rabelais (Tours), dans la collection “Perpectives historiques”, 174 pages, 22€.
Les auteurs:
– Pierre Allorant est professeur d’histoire du droit à l’université
d’Orléans (POLEN) et secrétaire général du Comité d’histoire parlementaire et politique.
– Gabriel Bergounioux est professeur de linguistique
à l’université d’Orléans et directeur du laboratoire ligérien de linguistique
– Pascal
Cordereix est conservateur en chef des bibliothèques et chef du service des documents sonores à la BNF de Paris.